Cet article provient du site du syndicat CFDT.
Ne respecte pas ses obligations en matière de formation professionnelle l’employeur qui n’a proposé à une salariée que deux formations au cours de ses huit années de présence dans l’entreprise. Cette dernière, titulaire d’un BTS, aurait dû bénéficier, durant une période aussi longue, d’autres formations. C’est ce que retient la Cour de cassation dans un arrêt du 5 octobre 2016. Cass. soc, 05.10.16, n° 15-13594.
• Faits et procédure Dans cette affaire, une salariée, agent de production, a été en arrêt maladie pour une tendinite à l’épaule reconnue comme maladie professionnelle. Le médecin du travail l’a déclarée inapte à son poste de travail ainsi qu’à tout poste en production ou en expédition du fait de cette maladie professionnelle. En revanche, il a précisé qu’elle serait apte à un poste de technicienne qualité, de type administratif ou d’encadrement en production, sans effort de manutention lourde ou répétitive. Elle a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement par lettre du 21 novembre 2011. C’est ainsi que la salariée a saisi le conseil de prud’hommes. Elle soutenait notamment que son employeur n’avait pas satisfait à son obligation de formation.
• Le non-respect de l’obligation de formation En application de l’article L. 6321-1 du Code du travail, l’employeur à pour obligation d’assurer l’adaptation des salariés à leur poste de travail. Il doit également veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi (notamment au regard de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations). En outre, il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences.La salariée reprochait à l’employeur « de ne pas lui avoir fait bénéficier de formations régulières et de ne pas avoir entretenu et développé des compétences plus larges que celles qui étaient mobilisées pour son emploi d’agent de fabrication ». En effet, l’employeur n’avait proposé à la salariée que deux formations au cours de ses huit années de présence dans l’entreprise, l’une sur la sécurité incendie du bâtiment et l’autre sur l’hygiène et la qualité (dont les notions avaient été déjà étudiées par la salariés en BTS).L’employeur, quant à lui, arguait que la salariée avait « bénéficié de formations en rapport avec l’emploi qu’elle occupait et que l’obligation à laquelle il était soumis n’était qu’une obligation d’adaptation de la salariée à l’évolution de son emploi d’agent de production ».Finalement, la Cour de cassation approuve la cour d’appel d’avoir jugé que : la salariée, titulaire d’un BTS, « aurait dû bénéficier, durant une période aussi longue, d’autres formations ». Les deux formations proposées à la salariée ont été jugées bien insuffisantes. D’autant plus que, selon les juges, la formation sécurité incendie était sans rapport avec l’adaptation de la salariée à son travail.En outre, les juges du fond établissent un lien entre le non-respect par l’employeur de son obligation de formation et l’absence de reclassement : le manquement de l’employeur « avait eu pour effet de limiter sa recherche d’emploi à des postes ne nécessitant pas de formation particulière » et de compromettre l’évolution professionnelle de la salariée. Le reclassement aurait été facilité si la salariée avait bénéficié de formations favorisant ses possibilités d’adaptation ou encore de maintien dans son emploi comme l’exige le Code du travail.
• Le non-respect de l’obligation de reclassement La salariée reprochait également à l’employeur de n’avoir jamais bénéficié de formation continue qui lui aurait permis d’être reclassée dans d’autres postes. Mais selon l’employeur, les seuls postes administratifs de l’entreprise étaient des emplois en comptabilité et en ressources humaines. Or, ce dernier affirmait que la salariée, qui ne disposait d’aucune formation en comptabilité ni d’aucune formation juridique, mais seulement d’un BTS agricole industries agro-alimentaires ne pouvait être reclassée sur un poste administratif sans une formation initiale.La cour d’appel, de nouveau approuvée par la Cour de cassation, rejette les arguments de l’employeur. Elle relève que ce dernier ne pouvait pas avoir rempli de manière loyale son obligation de recherche de reclassement. En effet, il aurait dû démontrer d’une part, « que les compétences mises en œuvre dans les postes administratifs étaient trop éloignées de celles de la salariée pour lui proposer un poste de ce type » et justifier, d’autre part, que la salariée, titulaire d’un BTS industrie agroalimentaire, « aurait été insusceptible d’acquérir une compétence qui lui aurait permis d’occuper tout poste administratif au sein d’une entreprise du groupe », ce qu’il n’a pas fait. Ainsi, la cour d’appel a pu juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse.