licenciement économique : la lettre ne doit pas obligatoirement faire référence à la situation du groupe

Cet article a été initialement publié sur le site du syndicat : FO

La lettre de licenciement pour motif économique doit mentionner la raison économique ainsi que son incidence sur l’emploi du salarié (Cass. soc., 30-4-97, n°94-42154). A défaut, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 27-3-12, n°11-14223). 

Lorsque l’entreprise appartient à un groupe, l’employeur qui invoque une suppression de l’emploi justifiée par des difficultés économiques, doit-il faire référence, dans la lettre de licenciement, aux difficultés économiques au niveau du secteur d’activité du groupe auquel celle-ci appartient ? 

A première vue, on pourrait le penser puisque le groupe constitue le cadre d’appréciation du motif économique (Cass. soc., 5-4-95, n° 93-42690 ; Cass. soc., 10-2-10, n° 08-45381). 

Par ailleurs, la lettre de licenciement fixe les limites du litige quant aux motifs énoncés. Telle n’est pas la position retenue par la Cour de cassation, dans un arrêt en date du 3 mai dernier (n°15-11046). Ce n’est qu’en cas de litige que l’employeur doit démontrer la réalité du motif invoqué au niveau du secteur d’activité du groupe. 

En l’espèce, pour dire que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d’appel a relevé, notamment, que la lettre de licenciement faisait exclusivement état des difficultés économiques de la société employeur, sans aucune référence à la situation du secteur d’activité du groupe auquel elle appartenait. 

La Cour de cassation censure l’arrêt rendu par la cour d’appel. La Haute Cour rappelle que la lettre de licenciement doit, selon l’article L 1233-16 du code du travail, comporter « l’énoncé des motifs économiques invoqués par l’employeur ; cette obligation légale a pour objet de permettre au salarié de connaître les motifs de son licenciement pour pouvoir éventuellement les discuter et de fixer les limites du litige quant aux motifs énoncés ». 

Toutefois, la Cour de cassation poursuit en énonçant que : « si la lettre de licenciement doit énoncer la cause économique du licenciement telle que prévue par l’article L. 1233-3 du code du travail et l’incidence matérielle de cette cause économique sur l’emploi ou le contrat de travail du salarié, l’appréciation de l’existence du motif invoqué relève de la discussion devant le juge en cas de litige ». 

Il en résulte que : « la lettre de licenciement qui mentionne que le licenciement a pour motifs économiques la suppression de l’emploi du salarié consécutive à la réorganisation de l’entreprise justifiée par des difficultés économiques et (ou) la nécessité de la sauvegarde de sa compétitivité répond aux exigences légales, sans qu’il soit nécessaire qu’elle précise le niveau d’appréciation de la cause économique quand l’entre-prise appartient à un groupe ; que c’est seulement en cas de litige qu’il appartient à l’employeur de démontrer, dans le périmètre pertinent, la réalité et le sérieux du motif invoqué. 

La cour d’appel ne pouvait donc pas retenir l’absence, dans la lettre de licenciement, de référence à la situation du secteur d’activité du groupe pour juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse. 

Un arrêt du même jour a rendu une solution similaire (Cass. soc., 3-5-16, n°14-29698, 14-29699, 14-29700). 

Ces deux arrêts du 3 mai 2016 constituent une confirmation de la jurisprudence (Cass. soc., 4-11-15, n°14-18140). 

La volonté de la Cour de cassation de ne pas accroître le formalisme de la lettre de licenciement se fait au détriment du salarié. 

Celui-ci est, en effet, privé de la pleine connaissance des motifs de son licenciement lors de la notification de ladite lettre. 

 

Ajouter aux articles favoris
Please login to bookmark Close
0 Shares:
Vous pourriez aussi aimer

Un premier avenant intéressant pour la PSC du ministère de l’Intérieur

Un an après la signature de l’accord ministériel du 16 mai 2024 sur la protection sociale complémentaire (PSC) des agents du ministère de l’Intérieur et des outre-mer, un premier avenant est venu, le 12 mars 2025, en corriger plusieurs aspects. Publié au Journal officiel d'aujourd'hui, ce texte modifie la structure des bénéficiaires, ajuste un article sur la gouvernance et corrige une rédaction ambiguë sur les ayants droit. La principale évolution porte sur...

Budget 2025 : plus de 33 milliards d’euros alloués aux établissements médico-sociaux par la CNSA

Un arrêté publié au Journal officiel d'aujourd'hui, fixe pour l’année 2025 l’objectif de dépenses et le montant total annuel des financements alloués aux établissements et services médico-sociaux relevant de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA). L’objectif de dépenses est établi à 33 248,30 Md€ pour l’ensemble du secteur. Ce montant se répartit entre 17 538,87 Md€ pour les établissements et services accueillant des personnes âgées...

Dotations médico-sociales 2025 : 32,55 Md€ répartis entre les régions par la CNSA

Par décision du 2 juin 2025, publiée au Journal officiel d'aujourd'hui, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) a fixé les dotations régionales limitatives applicables aux établissements et services médico-sociaux pour l’année 2025. Ces dotations, réparties par Agence régionale de santé (ARS), concernent à la fois les structures accueillant des personnes âgées et celles destinées aux personnes en situation de handicap. Le montant total...