Les projets d’ordonnance sont présentés ce matin en Conseil des Ministres. S’ils aboutissent, ils devraient apporter des réformes majeures pour le Code du Travail. Mais… la justice parviendra-t-elle à les bloquer ?
Décidément, c’est pas de chance ! Chaque fois que le gouvernement dépose un projet de texte, une affaire judiciaire vient pourrir le dossier. Il y a peu, Bayrou était rattrapé par la patrouille en pleine présentation du projet de loi de moralisation et finalement mis hors d’état de nuire. Désormais, c’est au tour de Muriel Pénicaud d’être dans le collimateur de la justice, juste au moment où ses projets d’ordonnance passent en conseil des ministres.
Pénicaud récompensée pour son soutien à Macron ?
Quand Alexis Kohler a prononcé le nom de “Pénicaud” pour le ministère du Travail. Ce fut la surprise. Désormais, on comprend mieux, au vu des services qu’elle a rendus à Emmanuel Macron.
Ainsi, en janvier 2016, alors directrice de Business France, elle utilise le denier public pour offrir au ministre Macron une très belle opération de communication, au milieu des start-upers français à Las Vegas. La French Tech Night commence à camper Macron dans l’iconographie du renouvellement.
Il se trouve que, depuis quelques semaines, le ministre de l’Économie a jeté les bases de son mouvement et les premiers groupes de travail commencent à mouliner. Pénicaud prend sur elle de financer l’opération pilotée, on le sait grâce à Libération aujourd’hui, par le cabinet du ministre lui-même. C’est une superbe mise en selle qu’elle offre au futur Président.
Libération :
“A peine un mois avant la soirée, l’agence doit régler à toute vitesse un acompte de 30 000 euros à l’hôtel où se tient la réception. Mais l’établissement n’accepte pas de virement et les cartes de Business France ne peuvent pas dépasser un plafond de paiement de 7 000 euros. La carte bleue personnelle du directeur financier de Business France est alors utilisée pour régler l’acompte. Pénicaud valide ce contournement des règles. Le service achat de l’agence découvrira le contrat avec l’hôtel seulement une semaine après. Un deuxième versement d’un montant équivalent est également approuvé en janvier par la directrice générale, peu de temps après la réception.”
Dans la pratique, les près de 400.000€, sur lesquels le Parquet National Financier n’a pas voulu enquêter pendant la campagne, constituent un pactole équivalent à celui qui était reproché à François Fillon. L’affaire pourrait donc faire des dégâts.
Pourquoi ce cadeau à Havas ?
L’une des questions des enquêteurs est de savoir pourquoi Pénicaud a choisi Havas comme prestataire, dont le périmètre d’intervention n’a cessé de s’élargir à mesure que Business France était dépassée par la situation. Aucun appel d’offre n’a eu lieu. Le choix était donc “de gré à gré”.
S’est-il agi de s’attirer les bonnes grâces de Bolloré, propriétaire du groupe ? Il faudrait être mauvaise langue pour le croire, surtout si l’on se souvient que Bolloré détient plusieurs médias qui ont marqué de l’inclination pour Macron depuis qu’il est parti en campagne.
Pénicaud est-elle une potiche ?
La nomination de Pénicaud au ministère du Travail s’est-elle résumée à un remerciement post-électoral pour les risques qu’elle a pris très tôt, et personnellement, dans ce dossier ? Toujours est-il que l’intéressée, si elle connaît certains dossiers en matière de travail, était curieusement absente des séances de concertation avec les organisations syndicales. Celles-ci ont été menées par son directeur de cabinet, ancien directeur des relations sociales qui passe, dans l’équipe Gattaz, pour un proche de la CFDT.
Cette absence constitue quand même un indice assez fort des équilibres qui se sont mis en place. Les maroquins ministériels semblent avoir peu d’épaisseur. L’essentiel des opérations est mené par les cabinets, en lien direct avec l’Élysée.
Les ministres doivent se contenter des moments de figuration qui leur sont laissés.
Le sacrifice prochain de Muriel Pénicaud ne bouleversera donc pas le suivi du dossier.