La semaine dernière a été riche en débats sur les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale. Voici un résumé des amendements adoptés.
Le projet de loi de finances
L’Assemblée Nationale a ouvert son débat en séance publique sur le projet de loi de finances 2016. Après un long préambule sur la différence entre déficit effectif et déficit structurel, les parlementaires se sont affrontés sur un amendement (finalement retiré) de la députée socialiste et féministe Catherine Coutelle, visant à permettre des déclarations séparées entre époux. L’amendement pourrait revenir après une simulation financière précise.
Fiscalisation des parachutes dorés
Les parlementaires ont adopté un amendement du député socialiste de Côte-d’Or Laurent Grandguillaume sur les parachutes dorés, déjà présenté (et retiré pour passer dans l’hémicycle) en commission. Cet amendement propose de diviser par deux le plafond d’exonération des indemnités de licenciement.
Comme l’a indiqué la rapporteuse Rabault:
Vous proposez de ramener la part non imposable de 218 000 euros à 114 120 euros. Afin que cela soit clair pour nos collègues, je précise que cela ne concerne pas les parachutes dorés les plus gros, qui continuent d’exister ; pour ces derniers, la question n’est pas seulement de nature fiscale.
Sûre de ne pas régler la question des plus gros parachutes, l’Assemblée a donc adopté cet amendement, après un débat sur la nature de ces indemnités. Une mesure identique a été adoptée jeudi sur la déductibilité de l’impôt sur les sociétés.
Révision des plafonds d’exonération pour les plus de 60 ans, les veuf et les veuves
L’Assemblée a adopté un amendement de la députée Christine Pires Beaune (socialiste, Puy-de-Dôme) prévoyant de réviser les seuils et les plafonds prévus par le code général des impôts pour que les contribuables âgés de plus de 60 ans, les veufs et les veuves soient exonérés partiellement ou totalement des impôts locaux, ainsi que de la redevance audiovisuelle ou de la CSG.
Abaissement de la TVA au seuil de 35.000 euros de vente en ligne
L’Assemblée a adopté, contre l’avis de la commission des Finances et du gouvernement, un amendement à l’article 3 du PLF présenté par le député Razzy Hammadi (socialiste, Seine-Saint-Denis), abaissant de 100.000 à 35.000 euros le seuil d’assujettissement à la TVA pour les ventes en ligne, y compris par groupement.
Le député Hammadi a justifié son amendement de cette façon:
Dans tous les pays de l’Union européenne qui ont légiféré sur le sujet, soit il a été indiqué d’emblée qu’il s’agissait d’opérateurs ou d’un groupement d’opérateurs, soit il y a eu des modifications législatives dans les six mois qui ont suivi pour le préciser. Je rappelle que, dans la loi Consommation, le mot : « opérateur » a toujours été remplacé, avec l’aval du Gouvernement, par les mots : « opérateur ou groupement d’opérateurs ». Ce que je dis est clair et peut être compris même à cette heure tardive : vous pouvez avoir derrière un opérateur de vente en ligne plusieurs fournisseurs et, par conséquent, l’effet recherché par le Gouvernement sera nul puisque même si le plafond est baissé de 100 000 euros à 35 000 euros, trois opérateurs derrière une enseigne unique de distribution pourront faire trois fois 35 000 euros et donc même remettre en cause le plafond actuel.
Elargissement des exonérations fiscales des SCOP aux groupes de SCOP
Avec le soutien du gouvernement, l’Assemblée a adopté un amendement du député (socialiste, Val-d’Oise) élargissant aux groupes de SCOP et aux SCOP de SCOP les exonérations fiscales dont les SCOP bénéficient.
Extension du crédit d’impôt des maîtres-restaurateurs
Contre l’avis de la commission, le député Dominique Lefebvre a reçu le soutien du secrétaire d’Etat au budget pour l’extension aux salariés du crédit d’impôt attribué aux maîtres restaurateurs chefs d’entreprise.
Mesure pour les poids lourds fonctionnant au gaz naturel et au biogaz
L’Assemblée a adopté plusieurs amendements identiques destinés à étendre l’amortissement fiscal supplémentaire exceptionnel aux poids lourds fonctionnant au gaz naturel et au biogaz.
Mesure en faveur des coopératives d’utilisation de matériel agricole (CUMA)
L’Assemblée a adopté un amendement du gouvernement étendant aux coopératives d’utilisation de matériel agricole le dispositif de suramortissement prévu pour ce matériel.
Emprunts toxiques des collectivités locales
Le gouvernement a soutenu un amendement du député Marc Goua (SRC, Maine-et-Loire) facilitant la renégociation des emprunts toxiques des collectivités locales. Le texte devrait toutefois faire l’objet de modifications durant la navette.
Exonération des plus-values immobilières
Le gouvernement a par ailleurs modifié un amendement du député Pupponi, président de l’ANRU sur l’exonération totale d’imposition des plus-values immobilières réalisées par des particuliers lorsqu’ils vendent un terrain pour la construction de logements sociaux. Celle-ci sera prolongée d’un an et non et trois, comme le souhaitait le député.
Un autre amendement a toutefois exclu cette exonération dans les quartiers dont le pourcentage de logements sociaux est supérieur à 50 %.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale
Le même 13 octobre, la commission des affaires sociales entamait l’examen du PLFSS 2016. En voici les points forts.
Redressement en cas de travail dissimulé
Un amendement de Gérard Bapt (socialiste, Haute-Garonne) a précisé les conditions dans lesquelles le redressement en cas de travail dissimulé peut être calculé “au réel”. La preuve d’une durée inférieure à six mois devra concerner non seulement la durée réelle d’emploi mais aussi le niveau réel de salaire. Afin d’éviter toute réduction de la sanction forfaitaire en fonction du temps passé dans l’entreprise, l’amendement substitue à une sanction forfaitaire correspondant à six SMIC une autre exprimée en fraction du plafond annuel de la sécurité sociale – en l’occurrence 25 %, ce qui correspond peu ou prou à six SMIC. Calculée en fraction du plafond annuel de sécurité sociale, la sanction forfaitaire s’élèvera à 9 510 euros, soit légèrement plus que si elle équivalait à six SMIC – 8 742 euros.
Calendrier de reprise de la dette par la CADES
Le même Gérard Bapt a fait voter un amendement technique sur le calendrier de reprise de la dette par la CADES: la limite fixée au 30 juin est désormais supprimée.
Généralisation de la complémentaire santé pour les retraités
Les deux rapporteurs socialistes, Gérard Bapt et l’ex-ministre Delaunay ont obtenu le vote de deux amendements identiques supprimant le mot “prépondérant” qualifiant le prix dans les critères futurs d’appels d’offres pour la généralisation de la complémentaire santé des retraités.
On notera cette remarque du député Bapt:
Il est important d’éviter que le critère de prix soit prépondérant pour prévenir toute action de dumping. Des organismes qui ne sont que marginalement concernés par les contrats individuels auraient pu, à la faveur d’une baisse illégitime du prix, élargir leur marché en y intégrant d’autres éléments de prévoyance, que peuvent proposer des assurances ou des instituts de prévoyance. Voilà pourquoi le groupe socialiste s’associe pleinement à la démarche de Mme la rapporteure Michèle Delaunay.
L’amendement précise que le crédit d’impôt de 2% revient à l’organisme assureur et qu’il n’y aura pas de mise en concurrence, puisque toutes les offres seront sélectionnées.
Complémentaire santé pour les salariés des particuliers employeurs
A la demande de Michèle Delaunay, un rapport permettant d’étudier une généralisation de la couverture complémentaire, qui serait étendue aux salariés de particuliers employeurs, doit être rédigé. Il prélude à une extension de l’aide à l’acquisition de la complémentaire santé à ces salariés.
Assurés polypensionnés
Michel Issindou (socialiste, Isère) a obtenu un amendement appliquant les règles de calcul du salaire annuel moyen des polypensionnés à partir de la génération de 1953. Le même amendement précise que les pensions de réversion seront également calculées dans le cadre de la liquidation unique, dès lors que la retraite du conjoint décédé a été calculée selon les mêmes règles.
Liquidation des trimestres des saisonniers
Le même Michel Issindou a présenté un amendement, adopté par la commission, rattachant les trimestres déclarés par les saisonniers au dernier employeur:
À partir de 2017, la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) étant le pivot du dispositif, la Mutualité sociale agricole (MSA) et le Régime social des indépendants (RSI) seront rattachés et auront les mêmes règles de fonctionnement. Aussi, dès le 1er janvier 2017, toutes les périodes de travail effectuées par un saisonnier seront liquidées par le dernier régime ou le principal employeur.
Dispositions pour les ministres du culte
Malgré l’opposition de Michel Issindou, la commission a adopté un amendement présenté par Dominique Tian (Les Républicains, Marseille) qui demande une étude sur les dysfonctionnements de la Caisse d’assurance vieillesse invalidité et maladie des cultes (CAVIMAC), créée en 1979. Celle-ci considère qu’aucun trimestre n’a été cotisé avant 1979.
Délégation de gestion du régime obligatoire
Les députés Bapt et Door ont présenté deux amendements identiques sur les conditions de délégation de gestion du régime obligatoire à des organismes complémentaires. L’amendement maintient dans la loi le principe des remises de gestion, tandis que les modalités de ces remises sont renvoyées au décret ; il précise également les conditions dans lesquelles il peut être mis fin aux délégations de gestion, en cas de défaillance d’un organisme délégataire ou en cas de demande formulée par une mutuelle.
L’amendement vise, bien entendu, à tirer les conséquences de la gestion de la Mutuelle des Etudiants (LMDE).
Ayant-droits majeurs en Alsace-Moselle
Un amendement du député Denis Jacquat (Les Républicains, Moselle) rétablit la possibilité de verser aux ayant-droits majeurs les prestations du régime obligatoire d’Alsace et de Moselle.
Temps partiel thérapeutique pour les travailleurs indépendants
Sylviane Bulteau (socialiste, Vendée) a présenté un amendement, adopté par la commission, étendant aux travailleurs indépendants les temps partiels thérapeutiques.
Prise en charge des certificats de décès par les ARS
La députée Lemorton (socialiste, Haute-Garonne) a fait passer un amendement qui prévoit, à titre expérimental, que les Agences Régionales de Santé prennent en charge financières l’établissement des certificats de décès par un médecin.
Budget des établissements médico-sociaux
La commission a adopté les amendements de Joëlle Huillier (socialiste, Isère) étendant à tous les établissements et services d’aide par le travail et tous les établissements pour personnes handicapées l’obligation de signer des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM) avec l’Etat, quelle que soit leur taille.
Prise en charge des pompes à morphine dans les EHPAD
La même Joëlle Huillier a également obtenu l’adoption d’un amendement demandant au gouvernement un rapport sur certains dispositifs sanitaires qui ne sont pas pris en charge dans le cadre du forfait soins en EHPAD, comme les pompes à morphine.
Rapport sur les consultations pluridisciplinaires
Michèle Delaunay a fait passer un amendement demandant un rapport sur les consultations pluridisciplinaires dans les hôpitaux, préparant leur rémunération future.
Rapport sur le cancer du sein
Bernadette Laclais (socialiste, Savoie) a pour sa part obtenu un amendement demandant au gouvernement un rapport sur la prise en charge de l’ensemble des frais directs ou indirects liés à une pathologie cancéreuse, et en particulier à celle du cancer du sein.
Pertinence des prescriptions de transport sanitaire
Michèle Delaunay a fait voter un amendement (non-stabilisé) sur la pertinence des prescriptions de transport sanitaire par les médecins hospitaliers. Le député républicain du Loiret Jean-Pierre Door s’est opposé à une extension du droit de prescrire aux auxiliaires médicaux.