Indemnité de précarité pour les intérimaires : la Cour de cassation précise sa jurisprudence

Cet article provient du site du syndicat CFDT.

 

 

Lorsqu’à l’issue d’une mission, le salarié intérimaire ne bénéficie pas immédiatement d’un contrat de travail à durée indéterminée avec l’entreprise utilisatrice, il a droit à une indemnité de fin de mission visant à compenser la précarité de sa situation. La Cour de cassation vient de préciser que cette indemnité est due, même si l’entreprise utilisatrice a adressé à l’intérimaire une promesse d’embauche avant le terme de sa mission mais que ce dernier ne l’a acceptée qu’après. Cass.soc.05.10.16, n°15-28672. 

 

Pour rappel, L. 1251-32 du Code du travail prévoit que lorsque, à l’issue d’une mission, le salarié ne bénéficie pas immédiatement d’un contrat de travail à durée indéterminée avec l’entreprise utilisatrice, il a droit, à titre de complément de salaire, à une indemnité de fin de mission destinée à compenser la précarité de sa situation. 

  • Faits, procédure

Un intérimaire est engagé pour une mission de 18 mois dont le terme est fixé au 1er mai 2012. Peu de temps avant la fin de sa mission, l’entreprise utilisatrice propose de l’embaucher en CDI. 

Le 10 mai 2012, soit quelques jours après la fin de sa mission, l’intérimaire décide d’accepter. Le contrat doit prendre effet au 16 mai 2012. N’ayant pas été rémunéré pendant plusieurs jours, l’intérimaire décide d’agir en justice afin que lui soit versée l’indemnité de fin de mission. 

Pour l’entreprise temporaire, l’indemnité de précarité n’a pas à être versée, car la promesse d’embauche en CDI avait été faite à l’intérimaire avant la fin de sa mission même s’il l’avait acceptée après le terme de celle-ci .  

Après avoir rappelé le principe posé par l’article L. 1251-32 du Code du travail, la Cour de cassation confirme que le contrat ayant été conclu après le terme de la mission, les juges du fond en ont exactement déduit que le salarié n’avait pas immédiatement bénéficié d’un CDI et qu’il avait droit à ce titre à l’indemnité de précarité, peu importe qu’une proposition d’embauche en CDI lui ait été faite avant la fin de sa mission. 

  • Une promesse d’embauche faite avant la fin de la mission ne suffit pas

Une promesse d’embauche est l’engagement de l’employeur de recruter un candidat à une offre d’emploi. Pour être considérée comme valable, la promesse doit être ferme, adressée à une personne désignée, préciser l’emploi proposé ainsi que la date d’entrée en fonction et, éventuellement, la rémunération et le lieu de travail. A défaut, c’est une simple offre d’emploi qui n’engage pas l’employeur en cas de rétractation. En l’espèce, la promesse d’embauche précisait l’emploi occupé, la date d’entrée en fonction et la rémunération. Il s’agissait donc bien d’une promesse d’embauche engageant l’employeur. 

Pour les juges, la promesse d’embauche en CDI ne suffit pas, encore faut-il qu’elle soit acceptée par l’intérimaire pour qu’il y ait rencontre des volontés des parties de conclure le contrat. Tant que la promesse d’embauche n’est pas acceptée, le CDI n’est pas conclu. L’employeur est le seul engagé par cette promesse. 

D’ailleurs, l’article L. 1243-10 du Code du travail prévoit que le salarié intérimaire peut valablement refuser la proposition de CDI sans pour autant perdre le bénéficie de l’indemnité de précarité. Un tel refus n’entre pas dans les causes d’exclusion du bénéfice de l’indemnité de précarité prévues par l’article L. 1251-33 du Code du travail, contrairement aux dispositions relatives au CDD qui prévoient expressément qu’en cas de refus d’un CDI pour occuper un même emploi ou un emploi similaire, avec une rémunération au moins équivalente, l’indemnité de précarité n’est pas due. 

  • La conclusion du CDI doit être immédiate

En l’espèce, la promesse d’embauche a été acceptée quelques jours après la fin de la mission. Aussi, pour les juges, l’intérimaire n’a pas bénéficié immédiatement d’un CDI, peu importe que le contrat ait été conclu peu de temps après le terme de la mission. A ce titre, l’indemnité de précarité n’est pas exclue et doit lui être versée par l’entreprise temporaire. 

Le fait que le contrat prenne effet après la conclusion ne semble guère poser problème. En effet, les juges ont déjà admis (1) que lorsque le début du CDI n’est pas concomitante avec sa signature, cette prise d’effet doit intervenir dans un délai raisonnable. Tel est le cas en l’espèce, puisque seuls quelques jours se sont écoulés entre la conclusion du contrat et sa prise d’effet. 

  • Un formalisme au bénéficie du salarié intérimaire

Cette indemnité a pour but de compenser la précarité dans laquelle se trouve l’intérimaire à l’issue de sa mission. On pourrait penser que s’il accepte la promesse d’embauche, même tardivement, il ne sera plus en situation de précarité puisque sa mission ne prend pas fin. Ce raisonnement n’est pas celui retenu par les juges qui font une application stricte de l’article L. 1251-32 du Code du travail permettant ainsi, de protéger le salarié intérimaire. 

Dès lors que le salarié se retrouve sans rémunération et donc en précarité, ne serait-ce que quelques jours, l’indemnité est due. 

Il en est de même en cas de CDD suivi d’un CDI, l’indemnité de fin de contrat est due lorsque le CDD et le CDI sont séparés par une période d’interruption, même de quelques jours. L’article L. 1243-8 du Code du travail prévoit que « lorsque, à l’issue d’un contrat de travail à durée déterminée, les relations contractuelles de travail ne se poursuivent pas par un contrat à durée indéterminée, le salarié a droit, à titre de complément de salaire, à une indemnité de fin de contrat destinée à compenser la précarité de sa situation ». 

 

Ajouter aux articles favoris
Please login to bookmark Close
0 Shares:
Découvrez nos analyses et capsules vidéos
Lancer la vidéo

Webinaire Tripalio #4 : zoom sur les dernières grandes actus CCN santé/prévoyance

Lancer la vidéo

PLFSS 2026 : rejet du socle solidaire et responsable par la ministre Amélie de Montchalin

Lancer la vidéo

Le pouls des CCN #1 : le régime santé de la CCN Syntec

Lancer la vidéo

Le pouls des CCN #4 : zoom sur le médico-social non lucratif

Vous pourriez aussi aimer
Lire plus

La solidarité au cœur du Comptoir des Branches de Malakoff Humanis

Le 2 décembre 2025, Malakoff Humanis a réuni ses partenaires dans un lieu conviviable pour une nouvelle édition du « Comptoir des branches ». Lancé en mai 2021 à l’initiative du groupe de protection sociale Malakoff Humanis, il agit comme un lieu d’échange et de co-construction pour les partenaires sociaux des branches professionnelles autour de la protection sociale. Ce rendez-vous s’est imposé comme un espace d’échange incontournable. À l’occasion des 10 ans du dispositif de solidarité, cette soirée était...
Lire plus

Le socle solidaire et responsable écarté du PLFSS en 2e lecture

C'est sans grande surprise que les députés ont supprimé hier (3 décembre 2025) l'article 6 quater, créant un socle solidaire et responsable, du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2026. Cet article inséré par le Sénat devait permettre de commercialiser des contrats moins généreux en termes de prestations que l'actuel contrat responsable et...

La Mutualité française appelle les français à participer aux Etats généraux de la santé et de la protection sociale

Ce communiqué a été diffusé par la Mutualité française. Comment les Français peuvent-ils se réapproprier leur protection sociale ? En donnant leur avis dans le cadre des Etats généraux de la santé et de la protection sociale, estime Julien Damon, professeur associé à Sciences Po. Il s’est exprimé lors du lancement...

Intériale quitte la Mutualité Française

Plusieurs confrères de la presse spécialisée annoncent, ces dernières heures, la décision prise par Intériale, ayant longtemps joué un rôle central dans l'assurance santé des agents et anciens agents du ministère de l'Intérieur, de quitter la fédération nationale de la mutualité française. Cette décision résulterait notamment des tensions survenues entre opérateurs mutualistes, et dans le cadre de leur représentation, au cours de la mise en œuvre de la réforme...

Avis d’extension d’avenants à la CCN de la production cinématographique

Le ministre du travail et des solidarités, envisage d’étendre, par avis publié le 4 décembre 2025, les dispositions de l’avenant du 26 mars 2025 relatif à la révision des salaires minima et de l'avenant du 26 septembre 2025 relatif à la classification, conclus dans le cadre de la convention collective nationale de la production cinématographique du 19 janvier 2012 (...