L’institution justifie son avis publié vendredi par une « efficacité insuffisante ». Le gouvernement doit désormais choisir de suivre ou non cet avis.
L’homéopathie ne devrait plus être remboursée par la sécurité sociale car son « efficacité » est « insuffisante », a estimé la Haute autorité de santé (HAS) dans son avis rendu public vendredi. Après cette conclusion scientifique, dont la teneur avait fuité dans la presse mercredi soir, la décision finale sera prise par le gouvernement.
« Au terme de la première évaluation scientifique française de ces médicaments, la commission de la transparence rend un avis défavorable à leur prise en charge par l’assurance maladie », a indiqué la HAS, selon laquelle ces produits ont « une efficacité insuffisante pour être proposés au remboursement ».
Agnès Buzyn devrait suivre l’avis de la HAS
La commission de la transparence est l’organisme de la HAS chargé d’évaluer les médicaments pour déterminer si leur remboursement est justifié. La ministre de la Santé, Agnès Buzyn, a affirmé à plusieurs reprises qu’elle suivrait l’avis de la HAS pour la décision finale. « Aujourd’hui, mon urgence est de gérer la canicule et son impact, je pense que la décision peut attendre encore quelques jours », avait-elle toutefois déclaré jeudi matin sur France 2, avant que l’avis lui soit officiellement communiqué.
« Les décisions sur le déremboursement des médicaments peuvent se prendre quelques jours ou quelques semaines après l’avis de la Haute Autorité de santé », avait-elle poursuivi. « Je rappelle que pour les médicaments anti-Alzheimer (déremboursés en août 2018, NDLR), la décision a été prise pratiquement un an après l’avis » de la HAS, avait souligné la ministre.
Pour tenter d’éviter le déremboursement des produits homéopathique, les labos fabricants, les homéopathes et les usagers ont lancé une campagne médiatique soutenue par des élus, « Mon homéo, mon choix ». Elle s’accompagne d’une pétition qui revendique plus d’un million de signatures. Les pro-homéopathie ont appelé à des manifestations à Paris et à Lyon vendredi à 10 h 30.
Controversée au sein du corps médical, l’homéopathie consiste à administrer au patient des substances en quantité infinitésimale, diluées à l’extrême dans de l’eau. Certains médicaments sont remboursés à 30 % par la Sécurité sociale à la faveur d’un régime dérogatoire, leur efficacité n’ayant pas été évaluée scientifiquement jusqu’à présent.
L’an dernier, le remboursement de l’homéopathie a représenté 126,8 millions d’euros sur un total d’environ 20 milliards pour l’ensemble des médicaments remboursés, selon l’Assurance maladie. Trois laboratoires fabriquent des produits homéopathiques remboursés : les français Boiron (leader mondial) et Lehning et le Suisse Weleda.
Boiron a immédiatement réagi au maintien par la Haute Autorité de santé (HAS) d’un avis défavorable au remboursement des médicaments homéopathiques. La HAS « ne tient pas compte de la spécificité des médicaments homéopathiques », estime, le groupe Boiron, spécialiste de ces produits. « Cet avis a été rendu dans un temps record et ne tient pas compte de la spécificité des médicaments homéopathiques », regrette la société dans un communiqué au lendemain de la suspension de son titre en Bourse à sa demande.
« La Commission de la transparence n’a pas intégré dans sa méthodologie d’évaluation l’intérêt de santé publique de ces médicaments, l’absence d’indications thérapeutiques résultant de leur statut réglementaire et le caractère individualisé du traitement homéopathique. »
Laboratoire Boiron
126,8 millions d’euros en 2018
Certains médicaments homéopathiques sont remboursés à 30 % par la Sécurité sociale à la faveur d’un régime dérogatoire, leur efficacité n’ayant pas été évaluée scientifiquement jusqu’à présent. L’an dernier, le remboursement de l’homéopathie a représenté 126,8 millions d’euros sur un total d’environ 20 milliards pour l’ensemble des médicaments remboursés, selon l’Assurance maladie.
Une modification du taux de remboursement des médicaments homéopathiques concernerait « 60 % de l’activité du groupe », assure encore l’industriel pour lequel 20 000 médecins prescrivent régulièrement de tels médicaments à 1,1 million de Français.
Le déremboursement de l’homéopathie menacerait, selon lui, 1 300 emplois sur ses 2 500 en France. Jeudi, après la fuite dans Libération, le groupe avait dénoncé « une nouvelle violation des règles de cette procédure d’évaluation qui nuit gravement à l’entreprise, ses salariés et ses actionnaires » et demandé à l’Autorité des marchés financiers (AMF) une suspension des échanges sur son titre à la Bourse de Paris.
Il revient désormais au gouvernement de décider, mais la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, a affirmé à plusieurs reprises qu’elle suivrait l’avis de la Commission de la transparence de la HAS.