Cet article a été initialement publié sur le site du syndicat de salariés FO.
La loi n°2015-990 du 6 août 2015 a doté le défenseur syndical d’une existence légale et d’un véritable statut (assorti de droits et d’obligations).
Le défenseur syndical est inscrit sur une liste arrêtée par le préfet de région sur : proposition des organisations d’employeurs et de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel, national et multi-professionnel ou dans au moins une branche
(art. L 1453-4).
La condition de représentativité pour désigner un défenseur syndical est-elle conforme à la constitution et, notamment au principe constitutionnel d’égalité devant la loi ?
La Cour de cassation (Cass. soc., 20-9-17, n°17-40047 et n°17-40048) a refusé de transmettre cette Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC) au Conseil constitutionnel au motif, notamment qu’elle n’était pas sérieuse.
Pour la Cour de cassation :
– il y a une différence de situation entre les OS représentatives (au niveau national et interprofessionnel ou, au moins, dans une branche) et les non représentatives, et ce de par leur implantation et la reconnaissance de leur action et au regard de leur capacité à représenter l’ensemble des salariés
;
– l’intention du législateur est de permettre aux travailleurs de recourir pour les assister ou les représenter devant les juridictions prud’homales, y compris les cours d’appel devant lesquelles la représentation est obligatoire, soit à un avocat soit à un salarié qui consacre à cette activité une partie significative de son temps de travail et a acquis une spécialisation dans ce domaine
;
– qu’en réservant à ces organisations syndicales représentatives le soin de désigner au sein d’un large périmètre le nombre adéquat des salariés qu’elles considéreront comme les plus aptes en fonction de leur expérience des relations professionnelles et de leurs connaissances en droit social, le législateur a obéi à une raison d’intérêt général et retenu un critère en lien direct avec l’objet de la loi
;
– ainsi, l’article L 1453-4 a pour objectif d’assurer l’effectivité du droit de la défense, droit fondamental à caractère constitutionnel, et ne méconnaît pas le principe de liberté syndicale en ce qu’elle ne constitue pas une ingérence de l’État dans le fonctionnement du syndicat ni ne porte atteinte à la liberté des travailleurs d’adhérer au syndicat de leur choix
.
Par la suite, un syndicat qui s’était vu refuser ses candidats au mandat de défenseur syndical par la Direccte (dorénavant DREETS), au motif qu’il ne remplissait pas la condition de représentativité posée par L 1453-4, a saisi le tribunal administratif. C’est à cette occasion, que le Conseil d’État a été saisi d’une demande de transmission au Conseil constitutionnel de ladite QPC et que, contrairement à la Cour de cassation, il a décidé de la transmettre.
Pour le Conseil constitutionnel (CC, 14-9-21, n°2021-928 QPC), l’article L 1453-4, en ce qu’il restreint les syndicats habilités à désigner des défenseurs syndicaux, est contraire à la Constitution.
Le Conseil constitutionnel considère que les dispositions contestées établissent une différence de traitement entre les organisations syndicales selon qu’elles soient représentatives ou non. Pour les Sages, cette différence de traitement n’est pas justifiée par un motif d’intérêt général et sans rapport avec l’objet de la loi.
Par conséquent, les dispositions contestées méconnaissent le principe d’égalité devant la loi et doivent être déclarées contraires à la Constitution
.
Ladite disposition est abrogée, à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel, et cette décision est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement.
Octroyer des prérogatives particulières à un syndicat représentatif n’est-il pas l’essence même du critère de représentativité ? Dit autrement, n’est-ce pas parce que FO a fait la preuve de sa représentativité que nous disposons de la légitimité pour assister et représenter les salariés en justice ?
Quelles seront dorénavant les exigences demandées à un syndicat pour qu’il soit apte à proposer des défenseurs syndicaux ?
N’y a-t-il pas à craindre que cette large ouverture de la désignation des défenseurs ne s’accompagne, à l’avenir d’une restriction des droits alloués à nos défenseurs (limitation du nombre, limitation des heures allouées, des droits à la formation