Evénementiel : les salariés du secteur n’ont pas à se plier au pass sanitaire

Cette publication est issue du site du syndicat de salariés CFDT.

Avec la mise en place du pass sanitaire s’est très vite posée la question de savoir si la vaccination ou le test PCR s’imposait aux travailleurs. La réponse est à ce jour négative. 

Rappel des règles applicables en matière de vaccination

Si l’employeur a une obligation de santé et de sécurité vis-à-vis de ses salariés et doit ainsi prendre toutes mesures pour préserver leur santé physique ou mentale (1), il ne peut tout se permettre et doit respecter les recommandations et consignes délivrées au niveau national.

Que cela soit la vaccination à la Covid-19 (sauf exception) ou son dépistage, l’employeur a seulement la possibilité de les proposer. Conformément au protocole national du Ministère du travail, ces mesures reposent « sur le volontariat et le secret médical ».

Seul le personnel de santé compétent (notamment la médecine du travail) peut collecter et accéder à d’éventuels fichiers de santé ou questionnaires médicaux du personnel de l’entreprise. Il en est de même pour les tests médicaux, sérologiques, de dépistage du Covid-19 ou encore en cas de vaccination, dont les résultats sont soumis au secret médical.

En effet, si la vaccination contre la Covid-19 n’est pas rendue obligatoire par le Code de santé publique, elle ne pourra pas être imposée aux salariés par les employeurs. Il n’est donc pas possible que l’employeur, même par le biais d’une convention collective, puisse l’imposer.

En entreprise, selon l’article R. 4426-6 du Code du travail, la vaccination est :

  • en principe recommandée par l’employeur, s’il y a lieu et sur proposition du médecin du travail, aux salariés non immunisés contre les agents biologiques pathogènes auxquels ils sont ou peuvent être exposés (2) ;
  • à l’exception obligatoire selon le Code de la santé publique dans deux hypothèses (3) : d’une part, lorsque la vaccination a été rendue obligatoire pour toute la population ou d’autre part, lorsque cette obligation vaccinale concerne des professions spécifiques.

Quelle articulation entre les exigences liées au pass sanitaire et les règles relatives à la vaccination ?

Que disent les textes instituant le pass sanitaire (4) ?

Ils prévoient que pour accéder à certains établissements, lieux ou évènements mentionnés, les personnes âgées de 11 ans et plus devront présenter l’un des documents suivants :

  • le résultat d’un test ou examen de dépistage réalisé moins de 48 heures avant l’accès à l’établissement, au lieu ou à l’évènement ;
  • un justificatif du statut vaccinal ;
  • un certificat de rétablissement.

Le décret n°2021-724 du 7 juin 2021 précise les conditions à remplir dans chacune des situations listées.

Le pass sanitaire, constitué de l’un de ces documents, doit être présenté pour l’accès aux établissements, lieux et évènements suivants, lorsqu’ils accueillent un nombre de visiteurs ou de spectateurs au moins égal à 1 000 personnes :

  • les salles d’auditions, de conférences, de réunions, de spectacles ou à usages multiples,
  • les chapiteaux, tentes et structures,
  • les salles de jeux,
  • les établissements à vocation commerciale destinés à des expositions, des foires-expositions ou des salons ayant un caractère temporaire,
  • les établissements sportifs de plein air autres que les parcs zoologiques, d’attractions et à thème,
  • les établissements sportifs couverts,
  • les évènements culturels, sportifs, ludiques ou festifs organisés dans l’espace public ou dans un lieu ouvert au public et susceptibles de donner lieu à un contrôle de l’accès des personnes.

Quid des personnes travaillant sur les lieux où le pass sanitaire est obligatoire ?

Hormis les exceptions reprises ci-dessus, l’employeur ne pourra en aucun cas imposer la vaccination aux salariés, et ce, même dans l’hypothèse où les salariés et organisateurs d’évènements accueillent du public pour qui l’obligation du pass sanitaire s’impose.

En effet, bien que le pass sanitaire soit obligatoire depuis le 9 juin pour accéder aux rassemblements de plus de 1 000 personnes, il ne sera toutefois pas demandé aux salariés, aux organisateurs ou aux professionnels qui se produisent dans ces lieux.

Dans sa version actualisée le 9 juin, le question/réponse du gouvernement sur le pass sanitaire indique bien que « dans les situations où le pass sera exigé, il s’agira de faire porter cette exigence sur le public accueilli (dès l’âge de 11 ans inclus). Il ne sera pas demandé aux salariés, aux organisateurs ou aux professionnels qui se produisent dans ces lieux d’avoir un pass sanitaire ». Cette précision est reprise dans le guide du pass sanitaire pour les professionnels édité par le gouvernement, qui explique : « Il s’agit d’un choix visant à alléger le dispositif pour des raisons de faisabilité pratique pour les gérants ». Également en ce sens, la Commission nationale informatique et libertés rappelle, dans son avis sur le pass rendu le 7 juin, qu’elle avait invité le gouvernement à préciser que les salariés, organisateurs et professionnels ne doivent pas être concernés par le dispositif.

D’ailleurs, et en l’absence de nouvelles dispositions, imposer un test PCR ou un vaccin aux salariés accueillant du public contreviendrait à l’article 16-3 du Code civil disposant que : « Il ne peut être porté atteinte à l’intégrité du corps humain qu’en cas de nécessité médicale pour la personne ou à titre exceptionnel dans l’intérêt thérapeutique d’autrui. Le consentement de l’intéressé doit être recueilli préalablement hors le cas où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle il n’est pas à même de consentir ». Il convient de rappeler in fine que le Conseil d’État considère comme une liberté fondamentale, « le droit de donner son consentement éclairé à un traitement » (Conseil d’État, par son arrêt du 16 août 2002 Mmes Valérie).

Enfin dans l’hypothèse où l’employeur sanctionnerait les salariés récalcitrants à la vaccination qui accueilleraient du public concerné par le pass sanitaire, il s’exposerait :

  • à des dommages et intérêts pour sanction illicite devant le Conseil de prud’hommes.
  • à une amende administrative de la CNIL pouvant aller de 2 à 4 % de son chiffre d’affaires (5), et le cas échéant à des sanctions pénales (6).
  • à des dommages et intérêts pour violation du droit de disposer de son corps et du droit à l’intégrité physique devant le tribunal judiciaire (7).

(1) L.4121-1 C.trav.

(2) La Covid-19 entre dans les « agents biologiques pathogènes auxquels les salariés non immunisés peuvent être : selon l’arrêté du 18 juillet 1994 fixant la liste des agents biologiques pathogènes (voir tableau B, les virus), il semble que la Covid-19 doit être considérée comme un agent biologique pathogène de groupe III.

(3) L.3111-4 et Art. L.3112-1 du Code de la santé publique.

(4) Décret n° 2021-724, 7.06.21.

(5) Dans ce cadre, la Commission pourra notamment contrôler la pertinence et la proportionnalité des données collectées, ou encore mettre en demeure, sanctionner pécuniairement tout traitement ou procédé contraire aux droits des données personnelles. Serait alors passible d’une amende pouvant aller jusqu’à 20 millions d’euros ou 4 % de son chiffre d’affaires, l’entreprise violant les règles susvisées et ne respectant pas l’injonction émise par la CNIL : Art. 21, Loi n° 78-17. 06.01.78 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

(6) 226-18 C.pén : Le fait de collecter des données à caractère personnel par un moyen frauduleux, déloyal ou illicite est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende.

(7) 16-1 et 16-2 C. civ.

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