A l’heure de la réforme des retraites et du report de l’âge légal de départ à 64 ans, l’espérance de vie des français en bonne santé et sans incapacité est centrale. La direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) a publié opportunément une étude détaillée sur le sujet. Les données actualisées à 2021 montrent que la France fait partie des pays de l’Union européenne où l’espérance de vie sans incapacité à 65 ans est la plus longue. Mais certaines données complémentaires montrent malgré tout que la part de personnes en situation d’incapacité évolue à la hausse en fonction de l’âge et que les français sont nombreux à subir une incapacité avant 65 ans.
L’étude de la Drees résume en quelques pages des informations clefs censées montrer aux français qu’un report de l’âge de leur départ en retraite à 64 ans ne les empêchera pas de vivre encore plusieurs années en relativement bonne santé. Cependant, certaines informations indiquent malgré tout que les incapacités sont indéniablement plus nombreuses à 65 ans qu’à 60 ans. Cette question intéresse particulièrement les organismes d’assurance complémentaire qui devront prendre en charge les salariés qui seront, mécaniquement, plus nombreux à faire face à un niveau d’incapacité avant leur départ en retraite.
Les français qui atteignent 65 ans en bonne santé peuvent espérer vivre entre 11,3 et 12,6 ans
En parcourant l’étude de la Drees, on remarque que ce service ministériel présente favorablement la durée d’espérance de vie sans incapacité en se focalisant sur les français ayant atteint 65 ans sans incapacité. Globalement une femme qui atteint 65 ans peut espérer vivre 23,2 années supplémentaires, un homme peut espérer en vivre 19,1. Si l’on tient compte des cas d’incapacité, l’espérance de vie diminue systématiquement : une femme qui atteint 65 ans sans incapacité peut espérer vivre encore 12,6 années sans incapacité, la durée tombe à 11,3 années pour un homme.
La France se situe au 5e rang européen s’agissant de l’espérance de vie sans incapacité des femmes à 65 ans, juste derrière le Danemark et l’Irlande. En revanche, la France est au 10e rang concernant l’espérance de vie sans incapacité des hommes à 65 ans : notamment devancée par l’Italie, l’Allemagne, la Belgique ou l’Espagne.
Mais ces statistiques prennent une tout autre forme si l’on s’intéresse à l’espérance de vie en partant de la naissance.
L’espérance de vie sans incapacité à la naissance plafonne entre 67 et 65,6 ans
La plupart des français qui craignent la réforme des retraites et le report de l’âge légal de départ ne sont pas ceux qui atteignent 65 ans sans incapacité, mais plutôt ceux qui risquent d’être affectés bien avant cet âge. L’étude de la Drees insiste peu sur ce point qui est pourtant essentiel. En effet, une femme peut statistiquement espérer vivre jusqu’à 67 ans sans incapacité. Or d’après les données complémentaires fournies par la Drees, 28,2% des femmes ayant 65 ans sont en situation d’incapacité : c’est seulement 0,4 point de plus que chez les femmes de 60 ans. Le constat est plus édifiant encore chez les hommes. Ils peuvent espérer vivre sans incapacité jusqu’à 65,6 ans et la part d’hommes présentant une incapacité à 65 ans est de 29,2% : c’est 4,1 points de plus que pour les hommes de 60 ans.
Ces données montrent qu’un part non négligeable de la population qui atteint 65 ans est déjà en état d’incapacité : ces personnes ont d’ailleurs de grandes difficultés à retrouver un travail avant de pouvoir prendre une retraite plus tardive que la moyenne*. La France n’a pas nécessairement à rougir de cet état des lieux mais des efforts peuvent être faits lorsqu’on étudie les statistiques européennes. Ainsi, la France n’est que 10e pour l’espérance de vie sans incapacités à la naissance des femmes, derrière l’Espagne, la Slovénie, la Grèce, la Bulgarie ou encore l’Italie. En parallèle, la France est 9e ex æquo avec la Slovénie pour l’espérance de vie sans incapacités à la naissance des hommes, derrière la Grèce, l’Espagne ou l’Italie.
*Sur ce sujet nous renvoyons nos lecteurs à une étude de la Drees publiée le 13 février 2020 intitulée "Les personnes ayant des incapacités quittent le marché du travail plus jeunes mais liquident leur retraite plus tard".