Un 1er mai lourd de menaces pour le gouvernement

Alors que le contexte social est pour le moins délicat, le gouvernement semble s’être tiré à bon compte de la Fête du Travail. Ses traditionnelles manifestations ont en effet plus été marquées par la division syndicale et les violences ayant eu lieu en marge du cortège parisien que par une démonstration de force du mouvement social. De tout autres enseignements peuvent toutefois être tirés du déroulement de la journée d’hier. 

Des réformistes esseulés

L’image n’a, certes, pas dû manquer de plaire à l’exécutif : Laurent Berger, Philippe Louis et Luc Bérille, les dirigeants de la CFDT, de la CFTC et de l’Unsa, ont ostensiblement fait bande à part pour le 1er mai. Dénonçant le parti pris des manifestants de la rue, qui ne font pas “bouger les dossiers”, ils ont vanté leur méthode “réformiste”, affirmant que leurs “trois organisations sont de vraies forces de propositions et de progrès”. Afin de mettre en scène leur 1er mai “culturel et revendicatif”, les responsables des trois centrales modérées étaient réunis dans une salle de cinéma parisienne afin de visionner un film italien promouvant le dialogue social – on aura décidément tout vu… 

Du point de vue du gouvernement, l’autocélébration des vertus du “réformisme” par les partisans dudit “réformisme” a, bien évidemment, un côté plus confortable que le mouvementisme actuellement prôné par la CGT. Ceci étant dit, l’optimisme de MM. Berger, Louis et Bérille suppose toutefois que leur manière de faire soit parfois couronnée de succès. Or, si l’on en croit ce qui se dit ici ou là, comme dans nos colonnes ou dans celle de Challenges, du côté de la CFDT au moins, de sérieux doutes commencent à poindre à ce sujet. A trop laisser les “réformistes” sur leur faim, Emmanuel Macron prend dangereusement le risque de les conduire au discrédit total. 

Vers le renouveau du front CGT – FO ?

Les manifestations qui ont eu lieu hier un peu partout en France, à l’appel notamment – mais pas seulement – de la CGT ont rassemblé, selon les sources, entre 143 500 et 210 000 personnes. L’estimation basse est fournie par les pouvoirs publics qui, l’an passé, avaient dénombré 142 000 manifestants. A Paris, ce sont entre 35 000 et 55 000 personnes qui ont pris part au cortège. S’appuyant sur ces chiffres, la CGT a qualifié la mobilisation d’hier de “réussite”. Force est de reconnaître que, pour l’heure, la multiplication des fronts sociaux et des journées de mobilisation ne semble pas avoir épuisé les forces militantes. 

Tirant les enseignements des défilés du 1er mai, les dirigeants de l’exécutif ont néanmoins probablement relevé que bien que défendant une ligne plus offensive que son prédécesseur Jean-Claude Mailly, Pascal Pavageau, le nouveau secrétaire général de Force Ouvrière, n’a pas manifesté aux côtés de Philippe Martinez. Encore faut-il préciser que M. Pavageau a d’ores et déjà annoncé qu’il entendait contacter ses homologues des autres centrales syndicales afin de parler “unité d’action”. La reconstitution du front CGT – FO observé lors de la mobilisation sociale contre la loi El Khomri pourrait dès lors avoir lieu. Quand on sait l’importance qu’a pu avoir le refus de M. Mailly de se mobiliser contre les ordonnances Travail dans le succès de la réforme gouvernementale, on mesure, à l’inverse, les turbulences que pourrait engendrer le renouveau d’une alliance entre la CGT et FO. 

L’irruption de la violence

Bien que méritant de retenir toutes les attentions, les éléments évoqués plus haut sont toutefois beaucoup moins commentés qu’un autre fait survenu hier dans le cortège parisien : l’irruption de la violence. Quelque “1200” manifestants – selon les chiffres repris par la presse – ont largement perturbé le défilé organisé dans la capitale. Quelques uns d’entre ces membres revendiquant leur appartenance à la mouvance du “Black Block” ont incendié un MacDonald – relevons qu’ils ont eu la présence d’esprit de ne pas s’attaquer à une brasserie ! – et engendré d’autres dégâts matériels. Les dirigeants de l’Etat ont vivement dénoncé ces actions tandis que les organisateurs de la manifestation, ainsi que certains dirigeants politiques de l’opposition – de la France Insoumise et du FN, entre autres – se sont interrogés sur les conditions dans lesquelles un si grand nombre de manifestants à la tenue vestimentaire pour le moins singulière a pu se déplacer si facilement dans Paris. 

Quoi qu’il en soit de ces débats intéressants, une chose est sûre : beaucoup de membres de la société, notamment chez les jeunes, ne demandent qu’à en découdre. Il pourrait être tentant, pour Emmanuel Macron, de se rassurer en songeant que ces éléments violents sont tout à fait minoritaires au sein de la population. Dans l’état actuel des choses, ceci est sans doute vrai. Hélas pour le chef de l’Etat, l’application en fin de mois de la réforme du contrôle technique, le passage à 80 km/h sur les routes à double sens en juillet ou encore les probables baisses nouvelles d’APL, pourraient tout à fait contribuer au développement d’un grand mouvement de colère nationale. 

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