Projet de loi Rebsamen: le gouvernement prisonnier de ses minorités

Le projet de loi Rebsamen fait l’objet d’une première polémique majeure: les associations féministes dénoncent la suppression du rapport de situation comparée inventé par Yvette Roudy en 1983.  

Une possibilité offerte en sourdine par la loi Rebsamen

De fait, dans son souci de rendre le dialogue social “plus stratégique” et moins formel, la loi Rebsamen propose de supprimer les articles L 2323-47 et 2323-57 du Code du Travail, qui prévoient un rapport de situation comparée annuelle. En revanche, l’obligation de présenter un plan d’action pour l’égalité professionnelle subsiste.  

Conformément à son esprit général, la loi Rebsamen prévoit en outre que, par accord majoritaire (à plus de 50% et non 30%…), l’entreprise peut transformer la négociation annuelle obligatoire sur les salaires en négociation triennale. Les dispositions applicables à l’égalité professionnelle sont incluses dans cettre transformation. 

Il n’en fallait pas plus pour attiser la colère des féministes qui soupçonnent François Rebsamen de vouloir saboter le statut de la femme. Le ministre répond pour sa part que l’équivalent du rapport de situation comparée se retrouvera dans la base unique de données instituée par l’ANI sur la sécurisation de l’emploi. 

Méfiance contre la démocratie sociale

L’origine de cette flambée d’émotions tient largement à l’ancienne conseillère de Najat Vallaud-Belkacem, Caroline de Haas, qui incarne un féminisme rigide et fondamentaliste. Issue du syndicalisme étudiant (de l’UNEF, syndicat financé par la LMDE) et n’ayant jamais mis les pieds dans une entreprise (sauf pour y dénoncer le machisme ambiant, bien entendu), Caroline de Haas a lancé une pétition hostile à cette disposition de la loi Rebsamen. Aujourd’hui proche de Benoît Hamon, Caroline de Haas est d’ailleurs beaucoup plus émue par la condition des femmes que par la condition des salariés. 

Elle appartient à une famille de pensée dont le gouvernement a du mal à se départir, très hostile à un renversement de la hiérarchie des normes. Pour ces “jacobins sociaux”, le droit laissé à l’entreprise de définir ses propres normes sociales par accord collectif majoritaire est forcément le début de toutes les scélératesses. L’intéressée déclare d’ailleurs au Journal du Dimanche: “Ce projet de loi est celui du Medef. Il pousse à la simplification à outrance de toutes les discussions sociales. Résultat : plus vous simplifiez, moins vous avez de données pour agir.” 

C’est bien la simplification et, au-delà, la possibilité offerte aux entreprises pour définir leurs propres règles, qui sont visées par ce mouvement. La démocratie sociale a décidément du mal à passer dans certains segments de la gauche française! 

Rebsamen devrait tenir bon

Pour éteindre la polémique, François Rebsamen a proposé le dépôt d’un amendement précisant quels indicateurs d’égalité devraient être inscrits dans la base unique de données. Cette solution de compromis permettrait au gouvernement de ne pas modifier la philosophie du texte tout en répondant aux principales critiques exprimées par ces associations.  

 

 

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