A l’appel notamment de la CGT et de FO et dans le cadre de la lutte contre le projet de loi Travail, les salariés du secteur des transports sont appelés à la grève reconductible à partir d’aujourd’hui. Si les syndicats à l’origine du mouvement jouent leur va-tout avec cette mobilisation, il pourrait s’avérer risquer, en l’état actuel des choses, de parier sur leur échec.
Une semaine de mobilisations tous azimuts
Toujours aussi remontée contre le projet de loi El Khomri et, en outre, contre le passage en force du gouvernement, l’intersyndicale CGT, FO, FSU, Solidaires, Unef, Unl et Fidl appelle, cette semaine, à l’organisation de deux journées de grèves et de manifestations, aujourd’hui mardi et jeudi 19 mai. Ces deux journées d’actions nationales permettront-elles à l’intersyndicale de reprendre la main en redonnant un second souffle à une mobilisation qui semble faiblir ? Les chiffres du nombre de participants aux manifestations seront évidemment scrutés de toutes parts. Ce n’est pourtant pas nécessairement de ce côté-ci que la lutte contre la loi Travail devrait prendre son tour le plus radical.
Les salariés des principales professions du secteur des transports : transports routiers, ferroviaires, aériens et maritimes, sont appelés à se mettre en grève reconductible cette semaine. Afin d’appuyer la mobilisation des transports, la CGT pétrole, première organisation syndicale de la branche, a appelé au blocage de l’ensemble des installations pétrolières françaises. Cette stratégie syndicale de radicalisation est à quitte ou double. En cas d’échec du mouvement de grève, le gouvernement aura sauvé le coeur de son projet de loi : l’inversion de la hiérarchie des normes. A l’inverse, en cas de blocage réussi du pays par l’intersyndicale, il n’aura guère d’autre choix que de retirer son texte et de subir une défaite en rase campagne.
Un mouvement qui débute plutôt fort
A la SNCF, l’accumulation des journées de grève n’empêche pas des prévisions de trafic perturbé pour demain et jeudi : 2 TGV sur 3 et, ailleurs, 1 train sur 2 en moyenne. D’après la CGT Ports et Docks, très puissante dans sa branche, les ports français sont à l’arrêt depuis lundi. Dans les transports routiers, depuis la nuit dernière, les salariés grévistes mettent en place des blocages à certains points névralgiques du territoire. Le Havre, Lille, Caen, Saint-Nazaire, Le Mans, Nantes, Bordeaux, Marseille, Lyon, Metz, la Marne ou la Creuse sont, entre autres, concernés par des barrages filtrants aux péages, des opérations escargots sur les routes, voire des blocages de ronds-points ou d’accès à tel ou tel site.
En particulier, les sites pétroliers font l’objet de toutes les attentions des salariés mobilisés. La raffinerie de Donges, en grève, n’approvisionnera plus aucune station-service pendant plusieurs jours. Au Havre, l’important dépôt de carburant Total est bloqué par des manifestants et Normandie Actu rapporte des cas de pénurie de carburants dans plusieurs stations-service. En Bretagne, c’est le dépôt Total de Veirn-sur-Seiche que les grévistes ont en ligne de mire, tandis que dans le Sud-Ouest, celui d’Ambès est bloqué depuis cette nuit. Fos-Sur-Mer est également le lieu d’actions d’ampleur. Dans certains cas, des participants locaux au mouvement “Nuit Debout” se sont joints aux salariés en grève.
La possibilité d’une paralysie du pays ?
Après quelques heures, le mouvement de grève et de blocage des salariés des transports semble ainsi rencontrer un certain succès. Ceci laisse entrevoir, dans les prochaines heures, la perspective de sa reconduction, sinon de son amplification. Là où ont lieu les actions importantes, les responsables syndicaux du secteur sont d’ailleurs décidés à battre le fer tant qu’il est chaud, ayant appelé à la tenue rapide d’assemblées générales afin de statuer sur les suites à donner au mouvement. Dans la mesure où, si l’on en croit les sondages, la loi Travail ne séduit pas les Français et où elle continue de faire l’objet d’une mobilisation interprofessionnelle, l’éventualité d’un emballement social généralisé n’est pas du tout à exclure.
Face à cette situation détériorée, l’exécutif joue d’une part la carte du “droit dans mes bottes”. Interrogé ce matin sur Europe 1 au sujet du projet de loi contesté, François Hollande a assuré : “Je ne céderai pas”. Plus généralement, il a réaffirmé que la France “va effectivement mieux”, sous-entendu : grâce à l’action gouvernementale. Circulez, il n’y a donc rien à voir ! D’autre part, le président de la République entend bien continuer à multiplier les tentatives de diversion de l’opinion publique. Evoquant une possible baisse d’impôt pour 2017, il a en outre tenté de relancer l’extravagante et scandaleuse affaire “Black M”, garantissant au maire de Verdun qu’en cas de tenue de son concert, l’Etat en assurerait la sécurité.
Hélas pour François Hollande, il n’est pas évident que sa parole présidentielle pour le moins hors sol suffira à calmer les esprits des opposants à la loi Travail.