Cet article a été initialement publié sur le site du syndicat la CFDT
L’inspection du travail est l’autorité compétente pour autoriser ou non le licenciement d’un salarié protégé. Qu’en est-il lorsque le refus d’autorisation intervient après l’expiration du délai de protection ? Le salarié n’est alors plus protégé et l’employeur peut poursuivre la procédure et prononcer le licenciement, fondé sur les mêmes motifs que ceux soumis à l’administration. C’est ce que rappelle la Cour de cassation. Cass.soc.06.01.16, n°14-12717.
Durant le mandat et pour un temps limité après celui-ci (6 mois), un représentant du personnel au CHSCT bénéficie d’une protection qui oblige l’employeur qui souhaite le licencier à obtenir l’autorisation de l’inspection du travail (1).
Refus d’autoriser le licenciement après l’expiration du délai de protection
En l’espèce, il s’agit d‘un représentant du personnel (secrétaire du CHSCT) dont le mandat a pris fin le 13 février 2009. Sa protection prenait donc définitivement fin, 6 mois après, soit le 13 août 2009. En juillet 2009, l’employeur demande, à l’inspection du travail, l’autorisation de le licencier. Cette dernière refuse le 10 septembre 2009, soit près d’un mois après l’expiration du délai de protection.
Pour l’employeur, le délai de protection ayant expiré, il pouvait licencier l’ancien représentant du personnel sans avoir obtenu l’autorisation de l’inspection du travail. Pour le salarié, l’inspection du travail ayant refusé son licenciement (même tardivement), l’employeur ne pouvait prononcer le licenciement en se fondant sur les motifs portés devant l’inspection du travail. Les juges du fond ont suivi le raisonnement du salarié.
La question posée à la Cour de cassation était donc la suivante ?
Lorsque le refus d’autorisation intervient après l’expiration du délai de protection, l’employeur peut-il passer outre l’autorisation de l’administration et prononcer le licenciement sur les mêmes motifs ?
Contrairement aux juges du fond, la Cour de cassation répond par la positive en appliquant strictement les dispositions du Code du travail relatives au champ d’application de la protection du salarié protégé.
Au visas des articles L. 2411-13 et L. 2421-3 du Code du travail, la Cour de cassation rappelle le principe selon lequel que lorsque le refus d’autorisation intervient après l’expiration du délai de protection, le salarié n’est plus protégé et l’employeur peut poursuivre la procédure et prononcer le licenciement en se fondant sur les mêmes motifs que ceux soumis à l’administration.
Bon à savoir : cette solution n’est pas nouvelle. La jurisprudence administrative (2) considère que l’inspection du travail n’est compétente que durant la protection du salarié, que ce soit lorsqu’elle est saisie ou lorsqu’elle rend sa décision. La Cour de cassation a elle aussi déjà adopté cette position en précisant que lorsque la protection légale a pris fin avant que l’inspection du travail rende sa décision, l’employeur peut licencier le salarié régulièrement sans son autorisation (3). L’autorité administrative n’est alors plus compétente.
Possibilité de licencier sans autorisation, en se fondant sur les motifs soumis à l’inspection du travail
L’employeur a l’obligation de demander l’autorisation de l’inspection du travail, tant que le salarié est protégé. Le licenciement peut être prononcé après l’expiration de la protection (4). Attention, l’employeur qui souhaite licencier un salarié protégé dont la protection prend bientôt fin, ne peut s’en croire dispenser.
En 2015, la Cour de cassation avait rendu un arrêt (5) qui précisait que le licenciement prononcé après l’expiration du délai de protection ne pouvait toutefois pas reposer sur des motifs précédemment rejetés par l’inspection du travail. Dans notre affaire, les motifs sur lesquels le licenciement est fondé sont rejetés postérieurement à l’expiration du délai de protection. C’est pourquoi, l’employeur peut fonder le licenciement sur les faits soumis à l’inspection du travail.
Contrairement à 2015, la décision de la Haute Cour n’est pas favorable au salarié. En effet, du moment que l’employeur s’est acquitté de son obligation de demander l’autorisation de l’inspection du travail avant l’expiration de la protection, peu importe que celle-ci ait eu le temps de répondre. Ce qui est regrettable sachant que l’inspection du travail est très sollicitée et dans des délais souvent assez courts. A noter que la publication de cet arrêt permet sans nul doute à la Cour de cassation de faire savoir que l’arrêt de 2015 ne remet pas en question sa jurisprudence antérieure en la matière.
Un autre arrêt relatif au licenciement d’un salarié protégé vient d’être rendu. Lorsque le salarié protégé refuse la modification de ses conditions de travail, l’employeur doit lui maintenir tous les éléments de rémunération perçus avant le refus et ce jusqu’à l’autorisation de le licencier. Contrairement à un salarié non protégé, lorsque le salarié refuse la modification de ses conditions de travail, l’inspection du travail doit autoriser son licenciement (6).