A Bar-le-Duc, union syndicale et convergence des luttes contre les ordonnances travail

D’après le ministère de l’Intérieur, les 200 manifestations d’hier contre les ordonnances travail ont rassemblé près de 223000 personnes. D’après la CGT, ce chiffre s’élève à “près de 500000”. Dans les deux cas, ces estimations sont similaires à celles évoquées après la première journée de mobilisation contre la loi El Khomri. A Bar-le-Duc (Meuse, 55), la continuité entre les deux mouvements est évidente, sans toutefois être totale. 

Une mobilisation réussie

A Bar-le-Duc, ce sont environ 300 personnes qui ont pris part au défilé d’hier contre la réforme du Code du Travail. Le chiffre peut paraître faible dans le cas d’une ville préfecture, mais il ne l’est pas en réalité. Non seulement la Meuse ne compte en effet pas parmi les départements les plus peuplés de France mais, en outre, son caractère plutôt rural s’accompagne d’un penchant modéré pour les manifestations de rue. Traditionnellement, les défilés syndicaux n’y rassemblent donc pas des foules considérables. 

Comme au niveau national, l’ampleur de la manifestation d’hier s’est ainsi avérée comparable à celle des premières manifestations contre la loi Travail entreprise par le gouvernement précédent. Si l’on juge ce critère pertinent, la mobilisation peut être qualifiée de réussie. 

Un défilé CGT et FO

Hier, deux organisations ont essentiellement animé le cortège barisien : la CGT et, au grand dam de Jean-Claude Mailly, FO. Si les militants de la CGT étaient indiscutablement les plus nombreux, ceux de FO formaient tout de même un tiers du défilé. Quelques militants Solidaires, FSU et même, CNT, complétaient le tableau côté syndicats de salariés. Aucun drapeau de la CFDT, de la CFTC ou de la CFE-CGC n’était en revanche de sortie. 

Chacun sa banderole, la CGT et FO n’avançaient pas les mêmes revendications. FO insistait sur son refus des ordonnances, placées dans la droite lignée de la loi El Khomri : “Ni 49.3 ni ordonnances. Non ! à la régression sociale”. FO 55 n’est décidément pas sur la même longueur d’ondes que l’Avenue du Maine… La CGT, quant à elle, tentait déjà d’élargir le périmètre de la mobilisation, exigeants les “mêmes droits pour tous : 32h, emploi, salaires, sécu, retraite”. 

Les antinucléaires en appui

Alors que la physionomie du cortège d’hier rappelait clairement celle des cortèges de l’année dernière, son arrivée, qui a eu lieu comme toujours sur la place Reggio – qui donne sur la préfecture – a été l’occasion d’une convergence des luttes. Les opposants au projet d’enfouissement des déchets nucléaires sur le site voisin de Bure, ainsi que la Confédération Paysanne, présents à Bar-le-Duc afin de protester contre le jugement d’un agriculteur ayant aidé des militants antinucléaires, ont apporté leur soutien aux manifestants contre les ordonnances. 

Leur discours visait à démontrer que les luttes des uns et des autres sont proches, puisqu’ils refusent une société qui ne repose, structurellement, sur rien de durable. “Nos vies, nos activités, nos territoires ne sont pas les poubelles du capitalisme !” affirmaient-ils notamment dans un tract qu’ils ont distribué. Leur présence a été largement saluée par les militants syndicaux. Etant donné le tour virulent récemment pris par les manifestations anti-Bure, un rapprochement entre les deux mouvements sociaux pourrait avoir d’importantes conséquences. 

FO très remontée

L’hypothèse d’une convergence des luttes mérite d’être prise d’autant plus au sérieux que les opposants aux ordonnances gouvernementales sont apparus particulièrement remontés. “Ce nouveau texte est une catastrophe, notamment pour les salariés des petites entreprises !” s’est ainsi emporté un sympathisant de la CGT, salarié d’une “petite entreprise” du transport, poursuivant : “Le patron va pouvoir négocier avec n’importe quel salarié de son choix, sur des sujets aussi importants que les primes, le 13ème mois, le temps de travail. Et si vous n’êtes pas d’accord, vous n’avez plus qu’une solution : perdre votre emploi. C’est scandaleux !” 

Chez FO, la tonalité était la même. Le discours public qu’Yves Briaux, le secrétaire général de l’union départementale, a donné à la fin de la manifestation a été pour le moins offensif. Dénonçant un “gouvernement du grand patronat, des riches, de la finance et du CAC 40”, il a appelé “la classe ouvrière” à refuser “l’explosion de la précarité”. Afin de “refuser de devenir les esclaves des temps modernes”, il a estimé que les salariés français devaient entrer en “résistance”. Son propos a été très applaudi. 

A Bar-le-Duc, entre une CGT bien mobilisée, une UD FO sur la ligne dure et des antinucléaires sur la brèche, la contestation des projets gouvernementaux actuels fait recette. Reste désormais à savoir si la CGT et FO vont réussir à amplifier leur mouvement la semaine prochaine. 

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